Le football par l’Histoire, l’Économie et la Morale

Avant la coupe du monde masculine de football de 2018, j’ai entrepris de réaliser une série de 11 mots du jour sur le football.

J’ai commencé par la citation d’Albert Camus souvent reprise, pour ensuite parler de philosophie, de souvenirs personnels, d’Histoire, d’économie et aussi de morale, car c’est bien de morale dont il est question quand on voit ce le football est devenu.

Ce que ce pèlerinage m’a appris sur ce sport, c’est qu’il n’est pas différent du monde de l’économie et que ses excès sont ceux du monde où l’argent est devenu la valeur principale de la grande majorité des décideurs et de ceux qui animent le monde.

C’est ainsi que la phrase de Camus est particulièrement pertinente et moderne, « Ce que je sais de la morale, c’est au football que je le dois… ». J’ai commencé par cette citation et j’ai fini par elle après avoir posé cette question de Robert Redeker : «Peut-on encore aimer le football ?».

Entre-temps, j’avais rapporté ce constat que La France était l’équipe la plus chère de celles qui participaient à la coupe du monde 2018 et j’avais conclu cet article par cette certitude que seule une équipe peut espérer gagner la victoire finale, non l’assemblage d’individualités. Je traçais alors cette perspective : « Cette coupe du monde nous révélera si les joueurs français forment une équipe. C’est une belle leçon morale au sens d’Albert Camus. »

Et nous avons, en effet, pu constater que Didier Deschamps et ses adjoints étaient parvenus à créer une équipe qui était solidaire et fonctionnait. Un peu de chance, en plus, et l’équipe de France a pu gagner la Coupe du Monde.

Depuis l’esprit d’équipe s’est un peu relâché, les résultats plus moyens en sont la conséquence.

Car, c’est une leçon du football, si on veut gagner une compétition, il faut d’abord coopérer au sein de l’équipe qui l’affronte.

1. «Ce que je sais de la morale, c’est au football que je le dois… »
Citation attribuée à Albert Camus

Mot du jour du mardi 12 juin 2018

[…] Il est question de jeu, il est question de passions, de violence, d’argent, de tricherie, de marchandisation d’êtres humains.

Il est question aussi d’équipes, d’entraînements, d’efforts, de discipline, de beauté du geste.

J’ai conscience que la quête d’intelligence, de critique, de mesure et d’équilibre risquent de mécontenter tout le monde.

  • Les passionnés du « beau jeu » qui ne souhaitent pas que l’on parle du côté obscur de ce sport qui depuis longtemps a attiré les cupides du monde.
  • Les indifférents et plus encore les « hostiles » à ce jeu qui est alors résumé par cette phrase cinglante : « un jeu financé par des gens modestes qui paient très chers pour aller regarder des millionnaires courir après un ballon » seront quant à eux exaspérés qu’on puisse consacrer du temps de cerveau et de réflexion à ce sport qui déclenchent tant de ferveur chez des millions de gens dans les stades et devant les écrans.

Je vais tenter pourtant de le faire, d’abord pour apprendre moi-même, ensuite pour essayer de mieux comprendre les aspects contradictoires : éclairer l’ombre par la lumière et percevoir l’ombre malgré la lumière.

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2. « La France est l’équipe la plus chère de celles qui participent à la coupe du monde 2018 »
Constat économique primaire

Mot du jour du mercredi 13 juin 2018

Ce que je sais de la morale, c’est au football que je le dois, disait Camus.

Pour apprendre la morale on peut passer par des expériences positives mais aussi négatives. […]

Le football professionnel d’aujourd’hui constitue certainement un exemple explicite des dérives de l’économie d’aujourd’hui :

  • la concentration des réussites,
  • la richesse en argent qui donne un avantage comparatif excessif

Il n’est ainsi que le reflet de notre époque.

[…] Et c’est justement le magazine économique les échos qui révèle ce constat qu’en faisant la somme de la valeur marchande de chaque joueur, car un joueur de football a une valeur marchande, c’est la France qui est l’équipe la plus chère de la coupe du monde.

Les économistes voudraient y voir un heureux présage pour ceux qui souhaitent la victoire de la Francei. Mais seule une équipe peut espérer gagner la victoire finale, non l’assemblage d’individualités.

Cette coupe du monde nous révélera si les joueurs français forment une équipe.

C’est une belle leçon morale au sens d’Albert Camus.

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3. «Un vide stupéfiant : l’Histoire officielle ignore le football.»
Eduardo Galeano dans « Football, ombre et lumière »

Mot du jour du jeudi 14 juin 2018

Quand je décide d’écrire une série de mots comme celle en cours, je ne pars jamais de rien : je dispose d’informations, de connaissances, de lectures, de vidéos me permettant de savoir que je peux écrire des articles ayant quelque consistance.

Mais très souvent, au cours de mes recherches, je découvre des auteurs, des inspirateurs qui m’apportent des compréhensions nouvelles.

Il en est ainsi d’Eduardo Hughes Galeano que je ne connaissais pas. Il est né en 1940 à Montevideo et mort en 2015 dans la même ville. C’est un écrivain, journaliste et dramaturge uruguayen, célèbre pour avoir écrit « Les Veines ouvertes de l’Amérique latine. » qui est un acte d’accusation contre l’exploitation de l’Amérique latine par les puissances étrangères depuis le XVe siècle. […]

Dès qu’on creuse un peu le sujet du football d’une manière analytique, de son rôle dans la société, de sa géopolitique on tombe immanquablement sur la citation de l’ouvrage qu’il a écrit « Football, ombre et lumière », paru en espagnol en 1995 avant d’être traduit trois ans plus tard en français.

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4. «Le football n’est pas une question de vie ou de mort, c’est quelque chose de bien plus important que cela.»
Bill Shankly, (1913-1981) entraîneur de Liverpool de 1959 à 1974

Mot du jour du vendredi 15 juin 2018

Liverpool est avec Manchester United le plus grand club de football anglais.

Bill Shankly (1913-1981) fut un de ses plus célèbres entraineurs.

[…] il semble que pour les véritables passionnés de football en Angleterre la phrase la plus célèbre concernant le football est celle mise en exergue.

Il semble que la phrase exacte serait celle-ci :

«Certaines personnes pensent que le football est une question de vie ou de mort. Je n’aime pas cette attitude. Je peux leur assurer que c’est beaucoup plus sérieux que cela.»

Un article de Slate du 31 août 2013 fait l’histoire de cette phrase […]

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5. « Le Tsu chu chinois et le Kemari japonais »
Ancêtres du football

Mot du jour du lundi 18 juin 2018

Un passionné d’Histoire comme moi, quand il veut approfondir le football va forcément s’intéresser à l’origine de ce jeu. Un groupe d’homo sapiens se partage en deux équipes et tape dans un ballon ou quelque chose qui peut faire office de balle.

Un documentaire très intéressant commence par évoquer un jeu qui a été inventé il y a 3 400 ans au Mexique puis qui a été adopté par les Mayas. Il n’en reste pas moins que ce jeu ne se jouait pas au pied. Les « arènes » dans lesquelles se déroulaient cette pratique sont visibles dans toutes les villes vestiges des peuples mayas dans le sud du Mexique, notamment dans la péninsule du Yucatan. Munies d’une balle en caoutchouc pouvant peser jusqu’à plus de 3 Kg, deux équipes s’affrontent en se renvoyant la balle en la frappant à l’aide des hanches, des coudes des fesses ou des genoux, l’usage des mains et des pieds étant interdit. L’objectif est de renvoyer la balle sans qu’elle ne retouche le sol. A chaque faute, c’est-à-dire balle touchant le sol ou usage d’une partie interdite, l’équipe fautive perd un point et l’autre équipe en gagne un.

Ce jeu avait pour nom « le pok-a-tok ». Le terrain de jeu le plus ancien connu, découvert à Paso de la Amada, au Mexique, daterait de 1 600 avant J.-C. Le terrain mesurait environ 80 mètres de long entre deux murs ou deux rangées de gradins. Le terrain de Chichen Itza, le plus grand du monde maya, mesure 140 mètres sur 35 mètres.

[…] Mais Philippe Villemus cite comme premier jeu de balle au pied un jeu chinois, dans l’Empire du Milieu appelé : « Le Tsu Chu » (parfois on trouve l’orthographe suivant « cuju »).

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6. « L’Episkyros grec et l’Haspartum romain»
Ancêtres du football

Mot du jour du mardi 19 juin 2018

Nous en étions restés, hier, à des jeux chinois le tsu chu et japonais le kemari. Nous avons aussi évoqué des jeux de balle en Mésopotamie et en Egypte. Mais nous sommes une civilisation judéo gréco romaine.

Et pour commencer par les grecs, Philippe Villemus évoque dans son livre « Le Dieu football » « l’Episkyros » :

« Les traces les plus précises du football historique remontent à l’Antiquité grecque.

En visitant le siège de la FIFA, à Zurich, on peut admirer, dans la salle d’accueil, une sculpture offerte par la Grèce à l’occasion de sa qualification à la phase finale de la Coupe du monde 1994 aux États-Unis. Il s’agit d’une reproduction d’un bas-relief en marbre de 450 avant J.-C., dont l’original est au musée national d’archéologie d’Athènes. Il fut trouvé au Pirée, en 1836. La stèle représente un athlète nu jonglant avec une balle sur sa cuisse, et se privant volontairement de ses mains devant un enfant. Il lui enseigne sans doute cette technique de jonglage avec les membres inférieurs. […]

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7. «Le mob football anglais et la soule française»
Ancêtres du football

Mot du jour du mercredi 20 juin 2018

Après l’antiquité des grecs et des romains nous en arrivons au moyen-âge. (Page 51 à 58 du livre « Le Dieu football – Ses origines – ses rites – ses symboles »)

Et nous allons nous intéresser à l’Angleterre et à la France.

En introduisant ce sujet deux caractéristiques communes me frappent :

  • D’abord ces jeux sont d’une grande violence ;
  • Ensuite, les autorités religieuses et seigneuriales ont tenté de les interdire.

[…] Tous ces jeux de ballon qu’on présente comme les ancêtres du football, dans des ouvrages consacrées au football, sont autant les ancêtres du rugby que du football et ressemble davantage à ce que j’appellerais de la bagarre.

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8. « Le calcio florentin »
Autre ancêtre du football

Mot du jour du jeudi 21 juin 2018

Dans les 3 précédents mots du jour, nous nous situions dans les temps du moyen-âge et de l’antiquité. Peu de sources nous permettaient de décrire avec certitude les règles et les conditions de jeu.

Tel n’est pas le cas du dernier jeu que je présenterai dans ce panorama des jeux de ballon qui ont annoncé le football.

C’est mon butinage et mes lectures récentes qui m’ont fait comprendre que si on nomme le championnat de football italien, « Le calcio » c’est pour des raisons historiques.

Le nom complet est : « Calcio Storico Fiorentino ». Il a été inventé au moyen-âge et s’est épanoui à la Renaissance essentiellement dans la ville de Florence.

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9. « Comment ils nous ont volé le football »
François Ruffin et Antoine Dumini

Mot du jour du vendredi 22 juin 2018

François Ruffin est désormais bien connu comme l’un des députés les plus flamboyants de la France insoumise et le réalisateur d’un film jouissif : « Merci Patron ».

Mais il était et reste le fondateur et rédacteur en chef du journal « Fakir ».

Antoine Dumini était quant à lui journaliste et rédacteur en chef au même journal « Fakir », il était aussi professeur des sciences économiques et sociales. Il était car il est mort d’une terrible maladie à l’âge de 26 ans en 2014.

À partir de 2013, le journal Fakir a lancé une collection de livres sur des sujets sociaux. Je me suis intéressé à celui qui a été écrit en 2013, dirigé par François Ruffin et Antoine Dumini : « Comment ils nous ont volé le football » et qui a pour sous-titre : « la mondialisation racontée par le ballon ».

Ce petit livre est passionnant et je vous en conseille vivement la lecture.

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10. «Quel sport est plus laid, plus balourd et moins gracieux que le football ?»
Pierre Desproges

Mot du jour du lundi 25 juin 2018

Nous avons jusqu’ici constaté qu’historiquement le football a comme ancêtre des jeux de ballons très brutaux comme la soule ou le calcio florentin.

Depuis la fin du XIXème siècle et le début du XXème siècle, ce jeu de balle au pied s’est un peu civilisé et s’est organisé autour de règles visant à diminuer la violence et augmenter la technique.

De sorte que la quête d’Eduardo Galeano qui se décrit comme «un mendiant de bon football» et implorant «Une belle action, pour l’amour de Dieu !» puisse acquérir quelque légitimité.

Nous avons aussi évoqué des tricheries qui ont émaillé l’histoire de ce sport et surtout les dérives du business football.

Pourtant globalement, le ton était plutôt bienveillant.

Mais il existe des personnes qui détestent ce sport, et je pense qu’il faut leur donner la parole aussi.

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11. «Peut-on encore aimer le football ?»
Robert Redeker

Mot du jour du mardi 26 juin 2018

Cet article est le 11ème de la série consacrée au football. Il me semble amusant de s’arrêter à 11 qui est le nombre de joueurs d’une équipe qui joue un match de football selon les règles prévues.

J’aurais pu aborder encore beaucoup d’autres sujets.

Par exemple parler de la science du football comme cet article du Monde qui est accessible aux abonnés et dans lequel on apprend que les deux plus grandes bases de données d’articles scientifiques, Scopus (propriété d’Elsevier) et Web of Science (propriété de Clarivate Analytics), recensent respectivement 20 120 et 18 870 publications avec le terme « soccer » (le nom du football aux Etats-Unis) dans leur titre ou résumé. Le plus vieil article remonte à 1932 dans Scopus, avec une étude sur l’évaluation du foot à l’école.

Et aussi cette vidéo de 3mn qui fait partie d’une série publiée également par et qui révèle que le football est le sport collectif le plus imprévisible. Un économiste David Sally qui a beaucoup étudié ce sujet a pu déterminer que dans le football le favori ne gagne en fin de compte qu’une fois sur deux. C’est presque comme une partie de pile ou face.

Sur les mêmes bases au base ball le favori l’emporte 3 fois sur 5 et au basket 2 fois sur 3. Selon David Sally la raison principale est que le football est un sport où les scores sont faibles. Entre 1901 et 2012, 17% des matches se sont achevés sur le score de 1-0. Et c’est probablement pour cela qu’il faut injecter autant de moyens financiers dans une équipe pour espérer faire diminuer de manière substantielle l’imprévisibilité du résultat.

[…] Robert Redeker, écrivain et agrégé de philosophie vient de faire paraître un livre « Peut-on encore aimer le football ?». C’est ce titre que j’ai choisi comme exergue à ce dernier mot du jour de la série.

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