Jeudi 11 décembre 2014

Jeudi 11 décembre 2014
« Les dépenses sont publiques, mais les recettes seront… privées ! »
Damien Lempereur
C’est ainsi que l’avocat et homme politique Damien Lempereur analyse une Loi de l’Assemblée Nationale. Plus précisément il écrit : « Euro 2016 : les dépenses sont publiques, mais les recettes seront… privées ! »
En effet, dans la nuit du mercredi 3 au jeudi 4 décembre, dans la plus grande discrétion, l’article 24 du projet de loi de finances rectificative pour 2014 a été adopté […] Cet article exempte la société commerciale «Euro 2016 SAS» d’impôts et de taxes pour toute la durée de la Coupe d’Europe des nations qui se déroulera en France en juin et en juillet 2016 !
Damien Lempereur explique : « Vos impôts préparent à coup de milliards la compétition à venir  [la France a déjà dépensé plus de deux milliards d’argent public uniquement pour rénover ou construire les stades qui accueilleront la compétition.], mais lorsqu’il s’agit d’en encaisser les dividendes, l’Etat en fait cadeau à … l’organisateur. Concrètement, la société en charge de l’organisation commerciale de la compétition ne sera redevable ni de l’impôt sur le revenu, ni de l’impôt sur les sociétés, ni de la taxe sur les salaires, ni de la taxe d’apprentissage […] Ce sont ainsi plusieurs centaines de millions d’euros de recettes fiscales auxquels l’Etat renonce par avance. Dans un contexte de crise et d’austérité, alors que l’on demande à chacun de faire toujours plus d’efforts pour économiser quelques dizaines de millions ici et là, il est anormal qu’une société commerciale qui va réaliser d’énormes bénéfices soit autorisée à ne pas payer d’impôt et de taxe en France.
Comme trop souvent en France les dépenses sont publiques, mais les recettes, elles, seront bien privées ! »
« Karine Berger, […] Secrétaire Nationale à l’économie du Parti Socialiste, [a twitté] : «honte sur nous qui venons de déposer les armes et céder au chantage fiscal le plus antirépublicain ».
« Alors bien sûr, l’Etat ne manquera pas de répondre que la candidature de la Fédération Française de Football à l’accueil de la compétition imposait que le gouvernement prenne, à l’égard des entités organisatrices, l’engagement de leur consentir un régime fiscal dérogatoire. Cet engagement a [été pris par la majorité précédente], dès 2010, d’un courrier ministériel joint au dossier de candidature. Doit-on comprendre que le ministre des finances et des comptes publics a un nouveau patron, à savoir la Fédération Française de Football. A moins qu’il ne s’agisse plutôt de l’UEFA, depuis les rives du Lac Léman en Suisse?»
Enfin, pour éviter que cet article 24 ne soit trop facilement reconnu inconstitutionnel – puisqu’une société commerciale va de facto être exemptée d’impôts et de taxes – le gouvernement a jugé bon d’élargir le régime fiscal dérogatoire à «toute compétition sportive internationale attribuée dans le cadre d’une sélection par un comité international, (…) d’un niveau au moins équivalent à un championnat d’Europe et (…) organisée de façon exceptionnelle sur le territoire français». L’Euro 2016 ne sera donc pas le seul à être exempté d’impôts! Le championnat d’Europe de Basket de 2015 organisé par la FIBA devrait pouvoir en bénéficier également.
La France devient donc pour les organisateurs de compétition sportive internationale un paradis fiscal !
Si la France n’avait pas donné cette exemption l’UEFA ne lui aurait pas donné l’organisation du tournoi.
Devant ce choix, la France a-t-elle fait le bon choix ?
Pour ma part, je ne le pense pas.