Jeudi 30 Octobre 2014

Jeudi 30 Octobre 2014
«Notre humanité commune nous invite à prendre soin les uns des autres.»
Denis Mukwege,
le médecin congolais qui vient de recevoir le Prix Sakharov décerné par le Parlement européen.
Denis Mukwege, 59 ans, «l’homme qui répare les femmes» selon le titre de la biographie que lui a consacré Colette Braeckman.
[Il dit] : «Depuis quinze ans, je suis témoin d’atrocités de masse commises sur le corps des femmes et contre les femmes et je ne peux pas rester les bras croisés, car notre humanité commune nous invite à prendre soin les uns des autres.»
Son combat vient en écho avec le mot du jour du Mardi 9 septembre 2014 où je reprenais cette phrase de la journaliste Annick Cojean : « C’est juste pas de chance d’être une femme dans la plupart des pays du Monde ». La violence faite aux femmes est et reste immense dans le monde.
Né en 1955 à Bukavu, dans l’Est du Congo belge, Denis Mukwege étudie la médecine au Burundi voisin. A la faveur d’une bourse il part étudier en France, à Angers pour se spécialiser en gynécologie-obstétrique. Le Dr Mukwege aurait pu alors rester vivre et travailler en France. Il a fait le choix de retourner dans son pays, la République démocratique du Congo (RDC), à l’hôpital de Lemera en 1989. En 1996, la guerre éclate: l’hôpital est dévasté. Il vit alors comme un déplacé de cette guerre qui déclencha des millions de réfugiés, des massacres et des viols de masse.
Denis Mukwege «répare les femmes» de son pays au péril de sa vie. Il a échappé de justesse à une tentative d’assassinat  en 2012, vraisemblablement parce que son engagement dérange, parce qu’il est un «témoin gênant» de ce qui se passe dans l’Est de la RDC, pour reprendre les termes de la journaliste belge Colette Braeckman, auteure d’un ouvrage sur le médecin et  sur l’hôpital de Panzi qu’il a ouvert au Congo.

«Au cas où il aurait archivé les témoignages de toutes les femmes violées, mutilées qui se sont présentés à lui, il aurait là un volumineux dossier dans lequel la justice internationale pourrait certainement puiser des indications et des témoignages. Rien que pour cela, tous les chefs de guerre de la région auraient intérêt à le voir disparaître ou se taire ou partir en exil», nous expliquait Colette Braeckman en 2013.
Et c’est ce qui avait fini par se produire: il a été un temps contraint à l’exil en Belgique depuis cette tentative d’assassinat. Pourtant, malgré ces menaces, malgré la distance, l’hôpital de Panzi, près de Bukavu, continue de vivre et Denis Mukwege veut poursuivre son combat et mobiliser davantage de soutiens pour aider les femmes de son pays. Un plaidoyer que l’on retrouve dans Panzi, un livre de témoignages paru en début de cette année, dans lequel il relate l’histoire qui a vu près de 40.000 femmes, victimes de viol de guerre, êtres «réparées» en RDC.