Vendredi 24 Juin 2016

«Les technocrates, si on leur donnait le Sahara, dans cinq ans il faudrait qu’ils achètent du sable ailleurs.»
Coluche

Souvent les mots du jour se moquent des technocrates.
Mais ce n’est pas le cas de celui du jour. Cela étant, il n’en fera pas l’éloge non plus.

Coluche est mort il y a 30 ans, exactement le 19 Juin 1986 à 41 ans.
Coluche était drôle et souvent ses blagues cognaient juste.

Il voulait faire une nouvelle blague sur les technocrates et il a donc eu ce mot qui signifie que si on donnait un désert aux technocrates, ils ne pourraient pas exploiter intelligemment le sable qui s’y trouve à profusion.

Seulement Coluche se trompait, cette blague tombe à plat dès que l’on approfondit un peu ce sujet à savoir l’importance du sable dans l’activité humaine et la qualité du sable du désert.

Les anglais ont aussi une expression : « C’est comme vendre du sable aux arabes » qui veut signifier qu’un acte est inutile avec cette idée que vendre du sable aux arabes ne présente aucune pertinence économique puisque « les Arabes » sont en grande partie un peuple du désert et qu’ils ont donc du sable à satiété.

C’est tout aussi faux, d’ailleurs aujourd’hui les peuples arabes de Dubaï, du Qatar et des autres états pétroliers achètent massivement du sable ! Notamment aux Australiens.

J’ai été sensibilisé à cette problématique lors de cette émission de France Inter : https://www.franceinter.fr/emissions/un-jour-dans-le-monde/un-jour-dans-le-monde-23-septembre-2015-0

On y apprend trois choses :

  • Le sable est une matière première essentielle pour l’économie contemporaine :
  • Le sable du désert est inutilisable pour ces activités
  • Le sable est surexploité et cette surexploitation constitue un problème écologique considérable dont on parle peu.

On y apprend en outre que le sable est la ressource naturelle la plus consommée après l’eau et les hydrocarbures.

<Un premier article donne des détails techniques :> :

« Le sable est la 3ème ressource la plus utilisée au monde, après l’air et l’eau. Il représente un volume d’échanges internationaux de 70 milliards de dollars par an. Plus de 15 milliards de tonnes utilisées dans le monde chaque année. Sur la planète, 2/3 de ce qui est construit est en béton armé et le béton est constitué de 2/3 de sable.

Chaque année en France, ce sont plus de 7 millions de tonnes de sable qui sont puisées dans l’océan Atlantique et dans la Manche. A 95 %, ce sable est destiné à la fabrication de béton pour la construction.

Il faut 200 tonnes de sable pour construire une maison de taille moyenne.
Un bâtiment comme un hôpital, consomme environ 3000 tonnes,
Chaque kilomètre d’autoroutes engloutit au moins 30 000 tonnes de sable,
Pour construire une centrale nucléaire, il faut compter environ 12 millions de tonnes.

Entre 75 et 90% des plages de la planète sont aujourd’hui menacées de disparition. Si on ne fait rien d’ici 2100, les plages du monde seront de l’histoire ancienne.

A Dubaï, la presqu’île artificielle autoproclamée “8e merveille du monde” a coûté plus de 12 milliards de dollars et a ingurgité près de 150 millions de tonnes de sable pompé au large des côtes de Dubaï.

3500 sociétés australiennes exportent vers la péninsule arabique. Leurs bénéfices ont triplé en 20 ans et le sable représente aujourd’hui un jackpot annuel de 5 milliards de dollars pour l’Australie.
L’existence même de Singapour dépend de ses importations de sable. Sa superficie s’est agrandie de 20% ces 40 dernières années. »

Evidemment une telle ressource avec tant d’intérêts financiers suscite des convoitises et même des délinquants : « En Inde, les pirates du sable agissent au grand jour sur plus de 8000 sites illégaux d’extraction, disséminés sur les côtes et rivières du sous-continent. Au Maroc, le sable volé représente à ce jour, aux alentours de 40% à 45% des prélèvements. »

En outre, il y a des exemples de gabegie :

« En Chine, 65 millions de logements sont vides, pourtant la construction est florissante et engloutie 1/4 du sable extrait sur la planète <

L’Espagne détient le triste record du pays qui a utilisé le plus de sable en Europe… pour rien. Alors qu’elle connaît une crise du logement sans précédent, 30% des habitations construites depuis 1996 sont inoccupées. Des aéroports entiers ont été édifiés, mais n’ont jamais vu un passager. »

Mais d’où vient le sable ?

« Depuis 5 000 ans, les hommes ont extrait des roches que ce soit par l’exploitation de mines, la déforestation ou encore l’extraction de granulats.

L’extraction de granulats (sables, graviers et galets) est majoritairement effectuée dans des carrières de sable et de gravier (granulats roulés) et de roches massives (granulats concassés, roches ornementales). Mais face à l’épuisement des ressources terrestres en granulats alluvionnaires et aux désordres engendrés par la surexploitation dans les rivières (approfondissement du lit, déchaussement d’ouvrages d’art), les industriels se sont tournés vers des ressources de substitution, notamment les granulats marins.

L’exploitation de sable marin s’est développée depuis les années 1970 et est en plein essor depuis. Certains navires de drague peuvent pomper par jour entre 4 000 et 400 000 m3 de sable au fond de la mer.

Pour résumer, le sable provient de deux origines principales : d’origine éruptive dans les carrières et surtout le sable marin. »

Les impacts sur l’environnement sont immenses et alarmants. La disparition du sable est une question qui se pose.

Denis Delestrac a réalisé un documentaire pour ARTE : « Le sable : enquête sur une disparition ».

Documentaire que vous pouvez acheter sur la boutique d’Arte : http://boutique.arte.tv/f9016-sable_enquete_disparition

<Ici vous trouverez un extrait du documentaire ARTE de Denis Delestrac : Le sable en quête sur une disparition>

Et ci-après un autre documentaire : http://future.arte.tv/fr/le-sable-va-t-il-vraiment-disparaitre#article-anchor-14781

Le site écologiste terraeco : http://www.terraeco.net/Les-marchands-de-sable-menacent,51075.html donne les informations suivantes :

« Le biologiste Pierre Mollo s’inquiète d’un autre impact, plus immédiat, sur le plancton. En remuant les fonds marins, l’extraction de sable crée un panache dans lequel remontent des minéraux et métaux lourds enfouis depuis des millénaires, explique l’enseignant chercheur, cela peut contribuer à rendre le plancton toxique. »

De quoi ajouter à l’inquiétude des ostréiculteurs. Elle-même moindre que celle des pêcheurs.

Car, par sa seule présence, la bruyante élingue des extracteurs fait fuir les poissons, tout en aspirant leur alimentation. Alors à Lannion, les professionnels de la pêche crient au conflit d’usage. « C’est insoluble car les zones qui présentent le plus grand nombre de sédiments marins, généralement les estuaires, sont aussi des niches de biodiversité », soupire Pierre Mollo.»

Il y a encore les articles suivants :

http://www.rfi.fr/afrique/20130604-le-business-marchands-sable

http://www.humanite.fr/environnement/marchands-de-sable-les-autres-pilleurs-d-ocean-542170

https://fr.sott.net/article/20862-L-Extraction-de-sable-Un-enjeu-environnemental-et-economique-majeur

Il existe donc bien des marchands de sable, peut-être même veulent-ils nous endormir pour qu’ils puissent faire leur business tranquillement, mais nous apprenons par toutes ces informations que ces marchands de sable ne sont pas de gentils bisounours.

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